Page:Zola - Fécondité.djvu/303

Cette page n’a pas encore été corrigée



Mathieu acheva d’étudier son grand projet, le défrichement de Chantebled, cette œuvre qui tirerait de la terre, éveillée enfin, une fécondité débordante. Et il se décida, l’œuvre fut résolue, contre toute prudence, dans une belle audace de foi et d’espoir.

Un matin, il prévint Beauchêne qu’il quitterait l’usine à la fin du mois. Il avait eu, la veille, avec Séguin, une longue conversation, il s’était assuré que ce dernier céderait volontiers l’ancien pavillon de chasse et une vingtaine d’hectares aux alentours à des conditions très douces. Comme il croyait le savoir, Séguin se trouvait dans une situation de fortune embrouillée, ayant perdu, disait-on des sommes considérables au jeu, payant des maîtresses très cher, menant une existence de désastre, depuis que son ménage se disloquait ; et il continuait à se plaindre des rentes dérisoires que lui rapportaient les immenses terrains incultes de Chantebled, simplement affermés à des sociétés de chasse. Sa pensée constante était de vendre ; mais à qui, où trouver un acquéreur pour des marécages, des landes, des broussailles ? Aussi fut-il enchanté de l’affaire que lui proposait Mathieu, dans l’espoir que, si une telle expérience réussissait, il finirait par se débarrasser de la propriété entière. Ils eurent d’autres entrevues, il voulut bien consentir à la vente, sans aucun argent comptant, par annuités, la première annuité ne devant même être payée qu’à deux ans