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obtenir seulement de ces filles qu’elles se lavent les mains ! Nous qui sommes si propres, qui mettons tout notre orgueil à ce que la maison soit propre ! Je puis bien dire que, lorsqu’il y a un grain de poussière quelque part, ce n’est pas ma faute. »

Mais, depuis que la fille était montée, un bruit effroyable se déchaînait, aux étages supérieurs. Quelque discussion, quelque bataille sans doute. De cet escalier, où jamais le public n’était admis, descendait, par moments, ainsi que d’un égout, tout un débondage d’ignominies, mêlées à des puanteurs. Et, comme le souffle empesté apportait un redoublement d’ignoble vacarme, cela devint intolérable.

« Je vous demande pardon, finit par dire M. Broquette. Madame va vous recevoir à l’instant. »

Il fila, s’envola par l’escalier, avec une agilité muette. Et, tout de suite, il y eut un éclat. Puis, la maison tomba brusquement à un silence de mort. On n’entendit plus, dans le bureau, que la voix de madame, qui continuait, d’un air digne, à vanter la marchandise.

« Eh bien ! mon ami, expliqua Boutan à Mathieu, en se promenant avec lui d’un bout à l’autre de l’allée, ce n’est encore rien, cet envers matériel des choses. Il faudrait pouvoir vous montrer l’envers des âmes. Et remarquez que cette maison est dans la bonne moyenne, car il existe des cavernes pires, que la police est obligée de fermer parfois, pour des contraventions trop graves… Sans doute on les surveille, sans doute il y a des règlements sévères qui forcent les nourrices à ne nous arriver qu’avec des livrets, des certificats de moralité, toutes sortes de papiers qu’elles doivent, dès le premier jour, aller faire viser à la Préfecture, où l’autorisation dernière leur est accordée. Mais ce n’est là que des précautions bien illusoires, n’empêchant aucune des fraudes, ni les tromperies sur l’âge véritable du lait, ni