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Norine riait, hochait la tête, en belle fille qui ne devait pas être de cet avis-là. Puis, comme ses deux petites sœurs la gênaient, elle voulut les congédier.

« Voyons, mes petits chats, vous dites que papa est encore si en colère contre moi, que je ne dois pas rentrer à la maison ?

— Oh ! expliqua Cécile, ce n’est pas tant qu’il est en colère, mais il crie que ça le déshonorerait, que tout le quartier le montrerait au doigt. Faut dire aussi qu’Euphrasie lui monte la tête, surtout depuis qu’elle va se marier.

— Comment ! Euphrasie va se marier ? Vous ne me le disiez pas. »

Et elle eut l’air très vexé, surtout lorsque ses sœurs, parlant à la fois, lui contèrent que le mari était Auguste Bénard, le jeune maçon à l’air réjoui qui habitait au-dessus d’eux. Il s’était toqué de la petite, bien qu’elle ne fût guère jolie, maigre à dix-huit ans comme une sauterelle, la trouvant sans doute solide quand même et travailleuse.

« Grand bien leur fasse à l’un comme à l’autre. Avant six mois, elle le battra, tant elle est méchante… Vous direz à maman que je me fiche de vous tous, que je n’ai besoin de personne. Je ne suis pas à la rue encore, je chercherai du travail, je trouverai bien quelqu’un pour m’aider… Vous entendez, ne revenez plus, qu’on ne m’embête pas davantage ! »

Irma, dont les huit ans étaient tendres, se mit a pleurer.

« Pourquoi nous dis-tu des sottises ? Nous ne sommes pas venues te faire de la peine. Moi qui voulais te demander si ce petit-là était bien à toi et si nous pouvions l’embrasser, avant de partir. »

Tout de suite, Norine regretta la violence de son dépit. Elle les appela encore ses petits chats, les baisa tendrement,