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os », une petite femme brune, sans teint, jaune et flétrie à vingt-six ans, le regardait d’un air d’égoïste orgueil.

— Oh ! non, il n’est jamais malade, répondit-elle. Seulement, il se plaint des jambes. Alors, je le fais s’allonger, et j’ai écrit hier soir au docteur Boutan de passer ce matin.

— Bah ! cria Beauchêne avec un gros rire, les femmes sont toutes les mêmes ! Un enfant qui est fort comme un Turc ! Ah ! je voudrais bien voir que ce gaillard-là ne fût pas solide !

Justement, le docteur Boutan entra, un homme gros et court, d’une quarantaine d’années, avec des yeux très fins dans sa figure épaisse, entièrement rasée, qui exprimait une grande bonté. Tout de suite il examina l’enfant, le palpa, l’ausculta ; puis, de son air de bienveillance, sérieux pourtant :

— Non, non, il n’y a rien. C’est la croissance. Un enfant qu’un hiver de Paris a rendu un peu pâlot, et que vont remettre quelques semaines de grand air, passées à la campagne.

— Je le disais bien ! cria de nouveau Beauchêne.

Constance avait gardé dans la sienne la petite main de son fils, qui, allongé de nouveau, refermait les paupières d’un air las ; et elle souriait, heureuse, agréable malgré sa face ingrate, quand elle voulait s’en donner la peine. Le docteur s’était assis, aimant à s’attarder, à causer dans les maisons amies. Accoucheur, soignant surtout les maladies des femmes et des enfants, il était le confesseur naturel, il savait tous les secrets, se trouvait comme chez lui dans les familles. C’était lui qui avait accouché Constance de ce fils unique, si gâté, et Marianne des quatre enfants qu’elle avait déjà.

Mathieu, debout, avait attendu pour faire son invitation.

— Alors, dit-il, si vous devez partir prochainement