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tat contre tout ce qu’elle respectait, la mesure, la prudence, l’ordre. Lorsqu’elle avait appris cette grossesse nouvelle, elle n’avait pas caché sa désapprobation ; et elle consentait bien à s’en taire désormais, mais il ne fallait pas qu’on l’attaquât, qu’on la plaisantât sur sa stérilité voulue. Si elle n’avait pas de fille, c’était qu’elle ne voulait pas en avoir.

Désirant la paix, Marianne, qui souriait du mot drôle de son mari, se hâta de changer la conversation. Elle demanda des nouvelles de Beauchêne.

— Et Alexandre, pourquoi ne me l’avez-vous pas amené ? Voici huit jours qu’il n’est venu.

— Mais, interrompit vivement Mathieu, je t’ai dit qu’il était parti hier soir pour la chasse. Il a dû coucher, de l’autre côté de Chantebled, à Puymoreau, afin de battre les bois, dès l’aube, et il ne rentrera sans doute que demain.

— Ah ! oui, c’est vrai, je me rappelle. Un beau temps pour battre les bois.

C’était encore là un sujet de conversation périlleux, et Marianne regrettait de l’avoir soulevé, car on ne savait jamais trop où Beauchêne pouvait bien être, lorsqu’il disait être à la chasse. Le prétexte d’une battue matinale était bon pour découcher, et il finissait par en abuser tellement, que Constance devait certainement savoir à quoi s’en tenir. Mais, devant ce ménage si uni, dont le mari ne sortait plus, toujours aux petits soins, depuis que la femme était enceinte, elle voulut être brave, avec tranquillité.

— C’est moi qui le force à sortir, à se dépenser. Il est très sanguin, il a besoin de grand air, la chasse est excellente pour lui.

À ce moment, il y eut un nouveau coup de sonnette, annonçant une autre visite. Et ce fut Valérie qui entra, avec sa fille Reine. Elle rougit, lorsqu’elle aperçut madame Beauchêne, si vive était sur elle l’impression de