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comme la chambre, donnait sur la rue de la Fédération, était emplie, le matin, de la gaieté du soleil levant.

Déjà, les enfants étaient attablés, le nez dans leur tasse, lorsqu’il y eut un coup de sonnette. Et le docteur Boutan entra. Alors, ce fut de nouveau une allégresse bruyante, car la bonne figure ronde du docteur faisait la joie des petits. Il les avait tous mis au monde, ils le traitaient en vieux camarade avec qui les familiarités étaient permises. Aussi bousculaient-ils leurs chaises, pour s’élancer, lorsque leur mère les arrêta d’un mot.

— Vous allez laisser le docteur tranquille, n’est-ce pas ? »

Puis, gaiement :

— Bonjour, docteur. Merci du beau soleil, car c’est vous qui l’avez sûrement commandé, pour que je puisse me promener cet après-midi.

— Mais oui, c’est moi. Je passais justement voir comment vous vous trouviez de l’ordonnance. »

Et Boutan, l’air ravi, prenant une chaise, vint s’asseoir près de la table, pendant que Mathieu, qui lui avait serré affectueusement la main, lui expliquait qu’on avait fait la grasse matinée.

— C’est très bien, qu’elle se repose, qu’elle prenne aussi le plus d’exercice possible… Je vois, d’ailleurs, qu’elle ne manque pas d’appétit. Quand je trouve mes clientes à table, je ne suis plus un médecin, mais un ami en visite. »

Marianne leva un doigt, d’un air de menace plaisante.

— Docteur, vous finissez par me faire trop solide, d’une santé qui m’humilie. Vous me forcerez à vous avouer des souffrances que je ne dis pas, pour n’inquiéter personne. Ainsi, cette nuit, j’ai eu quelques heures affreuses, des déchirements, comme si l’on m’écartelait.

— C’est vrai, ça ? demanda Mathieu tout pâle. Tu as souffert, pendant que je dormais ?