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tous les heureux de ce monde ne sont pas si heureux que moi.

Ils restèrent un moment embrassés, dans le soleil vermeil, qui les environnait d’or. Puis, il l’arrangea, remonta les oreillers, tira proprement la couverture, ne voulut absolument pas qu’elle se levât, avant qu’il eût mis la pièce en ordre. Déjà, il défaisait son petit lit, pliait les draps et le matelas, refermait la cage de fer, qu’il dissimulait sous une housse. Vainement, elle l’avait supplié de laisser ça, en disant que Zoé, la bonne amenée de la campagne, pouvait bien prendre cette peine. Il s’entêtait, répondait que la bonne l’agaçait, qu’il préférait être tout seul à lui donner des soins, à faire autour d’elle ce qu’il y avait à faire. C’était lui qui avait voulu coucher de la sorte, sur ce lit de fer, pour lui abandonner tout le grand lit, où il craignait de la gêner. Et, maintenant, il s’occupait du ménage, défendait jalousement la porte de la chambre, afin que la chère épouse fût à lui entièrement, heureux lorsqu’il descendait aux soins les plus puérils, ne croyant jamais faire assez pour le culte dont il l’honorait.

— Je t’en prie, puisque les enfants nous laissent la paix, reste encore un peu couchée. Ça te reposera.

Comme un frisson le prenait, il s’aperçut qu’il ne faisait pas chaud, il se tourmenta de n’avoir pas songé tout de suite à rallumer le feu. Des bûches étaient dans un coin, avec du menu bois.

— C’est stupide, je te laisse geler, j’aurais bien pu commencer par là.

Il s’était agenouillé devant la cheminée, tandis qu’elle criait  :

— En voilà une idée encore  ! Laisse donc ça, appelle Zoé.

— Non, non  ! elle ne sait pas faire le feu, ça m’amuse de le faire.

Et il eut un rire de triomphe, quand un grand feu clair