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mois, ayant décidé qu’il serait plus prudent d’attendre les couches à Paris, puis de retourner à Chantebled pour les relevailles, dès les premières belles journées d’avril.

— Attends, reprit-il, je vais donner du jour.

Il alla tirer un rideau. La chambre, à demi obscure, s’éclaira d’un large rayon de jaune soleil d’hiver.

— Ah ! le soleil, le soleil ! un temps splendide ! et un dimanche ! Enfin, cette après-midi, je pourrai donc aller te promener un peu avec les enfants !

Elle le rappela, lui prit les mains, lorsqu’il se fut assis au bord du lit ; et, gaiement :

— Voici vingt minutes que, moi non plus, je ne dors pas, évitant de me retourner, désirant te laisser faire ta grasse matinée du dimanche. Hein ? nous sommes bons, tous les deux, à ne pas vouloir nous réveiller l’un l’autre, quand nous avons les yeux grands ouverts !

— Oh ! dit-il, moi, j’étais si heureux de croire que tu te reposais ! Maintenant, le dimanche, je n’ai qu’une joie, celle de ne pas quitter cette chambre, le matin, de passer la journée entière, avec toi et les petits.

Puis, il eut un cri de surprise et de remords.

— Tiens ! je ne t’ai pas embrassée !

Elle s’était relevée un peu, le coude dans ses deux oreillers ; et il la saisit entre ses bras, d’une étreinte vive.

Mais elle eut une légère plainte.

— Oh ! chéri, prends garde !

Ce fut alors du désespoir, de l’adoration.

— Je t’ai fait du mal ! je t’ai fait du mal ! Faut-il être brute, pour te bousculer ainsi !… Oh ! chère, chère femme, toi qui m’es sacrée, que je ne voudrais toucher qu’avec des caresses, dont je serais si heureux de prendre les souffrances ! Oui, je rêve d’avoir des mains de fée, des mains que tu ne sentirais même pas, qui changeraient tes douleurs en joies… Et je vais te faire du mal !

Elle dut le consoler.