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depuis trois semaines, à quinze mois, qui fleurissait de ses petites chairs blanches le troisième lit, un berceau où elle reposait à demi nue. La mère dut la recouvrir, tant elle avait saccagé la couverture de ses poings volontaires. Puis, de son côté, pendant ce temps, le père s’inquiéta de l’oreiller d’Ambroise, qui avait glissé. Tous les deux, sans bruit, avec des mouvements tendres, allaient et venaient, se penchaient, revenaient se pencher sur les doux visages endormis, pour s’assurer qu’ils étaient bien calmes, qu’ils riaient aux anges. Ils les baisèrent, s’attardèrent encore, en croyant que Blaise et Denis avaient remué. Enfin, ce fut la mère qui emporta la lampe, ils s’en allèrent, l’un après l’autre, sur la pointe des pieds.

Lorsque Marianne eut reposé la lampe au milieu de la table, dans leur chambre, en laissant la porte de communication ouverte, elle retrouva sa voix pour dire tout haut :

— Je n’ai pas voulu t’inquiéter, en te racontant ça, dehors : Rose m’a donné des inquiétudes aujourd’hui, je ne l’ai pas trouvée bien, et je n’ai été rassurée que ce soir.

Puis, voyant le brusque sursaut, la pâleur de Mathieu :

— Oh ! ce n’est rien, je ne serais pas sortie, si j’avais gardé la moindre crainte. Seulement, avec ces petits êtres, on n’est jamais tranquille… Voyons, couche-toi, il est plus de minuit.

Tranquillement, elle se mit à se déshabiller elle-même, sans se préoccuper de la fenêtre restée ouverte, ne craignant d’autres yeux que les millions d’étoiles, dans l’infini de l’horizon. Quand elle eut enlevé sa robe, son jupon, son corset, elle demeura un instant devant la glace, à se coiffer pour la nuit, laissant pendre les lourds cheveux de son chignon en une longue natte, qui lui descendait aux jarrets.

Mathieu ne parut pas l’avoir entendue. Au lieu de se