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des bois. Et ils ne parlaient plus, envahis par le silence souverain de la nuit, en marche vers ce toit si calme, où dormaient leurs enfants.

Quand ils furent rentrés, Mathieu ferma la porte au verrou ; puis, ils montèrent à tâtons, en faisant le moins de bruit possible. Le rez-de-chaussée se composait, à droite du couloir, d’un salon et d’une salle à manger, à gauche, d’une cuisine et d’une remise. Au premier, il y avait quatre chambres. Leur très modeste mobilier, apporté de Paris, dansait dans les pièces trop vastes. Mais ils étaient sans orgueil, ils en riaient. Tout leur luxe avait consisté à mettre aux fenêtres de petits rideaux d’andrinople, dont le reflet rouge leur semblait donner aux pièces une richesse extraordinaire.

— Sûrement, Zoé s’est endormie, dit Marianne, en n’entendant aucun bruit, pas un souffle.

Et c’était vrai, la paysanne qui s’était installée à tricoter, devant la lampe, dans la chambre du ménage, pour que la lumière ne gênât pas les enfants, dont les lits occupaient la pièce voisine, dormait profondément, le nez tombé sur son ouvrage. Et toute la paix d’un profond sommeil venait également par la porte, laissée grande ouverte.

Il fallut réveiller doucement Zoé, étouffer ses excuses, l’envoyer se coucher, engourdie, ahurie, en lui recommandant de ne pas faire trop de tapage. Déjà, Mathieu avait pris la lampe, était passé dans la chambre des enfants, pour les voir et les embrasser. Rarement ils se réveillaient. Il posa la lampe sur la cheminée, et il regardait les trois petits lits, lorsque Marianne vint le rejoindre. Dans le lit du fond, contre le mur, se trouvaient Blaise et Denis, les deux jumeaux, de forts gaillards de six ans, qui dormaient le plus souvent aux bras l’un de l’autre. Contre le mur d’en face, le second lit était occupé par Ambroise seul, quatre ans bientôt, un chérubin d’une beauté rare. Et c’était mademoiselle Rose, sevrée