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LE CARNET DE DANSE




I


Te souviens-tu, Ninon, de notre longue course dans les bois ? L’automne semait déjà les arbres de feuilles d’un jaune pourpre que doraient encore les rayons du soleil couchant. L’herbe était plus claire sous nos pas qu’aux premiers jours de mai, et les mousses, privées de rosée, pouvaient à peine donner asile à quelques rares insectes. Perdus dans la forêt pleine de bruits mélancoliques, nous pensions entendre les plaintes naïves de la femme qui croit voir à son front la première ride. Les feuillages, que ne pouvait tromper cette pâle et douce soirée, sentaient venir l’hiver dans la brise plus fraîche, et se laissaient tristement bercer, pleurant leur verdure rougie.