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ET DU PETIT MÉDÉRIC

idées les plus fécondes dans les fosses creusées sur les champs de bataille ; ils baptisent la terre d’un baptême de sang pour hâter l’ère prochaine de liberté. Mais nous n’ajouterons pas qu’ils auront ainsi une besogne éternelle, attendant vainement une moisson qui ne saurait lever sur des tombes.

« Voilà, mes chers sujets, ce que j’ai imaginé. L’idée a toute l’ampleur et l’absurdité nécessaires pour réussir. Donc, ceux d’entre vous qui se sentiraient le besoin de proclamer une ou deux républiques sont priés de n’en rien faire chez moi. Je leur ouvre charitablement les empires des autres monarques. Qu’ils disposent librement des provinces, changent les formes des gouvernements, consultent le bon plaisir des peuples ; qu’ils se fassent tuer chez mes voisins, au nom de la liberté, et me laissent gouverner chez moi aussi despotiquement que je l’entendrai.

« Mon règne sera un règne guerrier.

« Obtenir la paix au dedans est un problème plus difficile à résoudre. On a beau se débarrasser des méchants garçons, il reste toujours dans les masses un esprit de révolte contre le maître de leur choix. Souvent j’ai réfléchi à cette haine sourde que les nations ont portée de tous temps à leurs princes, et j’avoue n’avoir jamais pu en trouver la cause raisonnable et logique. Nous mettrons cette question au concours dans nos académies, et nos savants, sans aucun doute se hâteront de nous indiquer d’où vient le mal et quel doit être le remède. Mais, en attendant l’aide de la