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LE GRAND TRIMARD

la table des premières. On avait sans doute répété mon nom. Et, après le dîner, un monsieur d’une cinquantaine d’années, très élégant, avec une barbe en fleuve, vint me visiter, fort en colère :

— Je sais qui vous êtes ! s’écria-t-il.

Il s’animait, gesticulait, ameutait les passagers, disant que j’étais une sorte d’anarchiste et que le mieux serait de me jeter par-dessus bord :

— À l’eau, l’anarchiste !

Dans sa comique exaltation de bourgeois féroce, il m’agonissait de sottises et en un si grand renfort d’épithètes cocasses que je ripostais par éclats de rire.

Ce n’était certes pas le moment de développer l’idée qui m’est chère et que le vocable d’anarchie n’explique que par à peu près.

Mon attitude portait à son comble la rage du vieux monsieur. Il fallut que ses amis se décidassent à l’entraîner de force, dans la crainte de quelque coup de sang.

Le lendemain, comme on touchait à Port-