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LE GRAND TRIMARD

Le commandant, tranquillement accoudé sur la dunette avec quelques privilégiés passagers de première, souriait, très amusé de la scène :

On déchargeait le pauvre monde.

Je m’étais jeté dans une barque maintenant pleine et que les bateliers âpres voulaient charger encore. Mais nous étions tellement secoués par les vagues qu’ils se décidèrent à filer.

Cinq rameurs, debout, voguaient en rythmant les coups des larges avirons sur une sorte de chant guttural qui devenait parfois sauvage comme un cri de détresse quand les lames plus grosses de plus haut nous jetaient aux précipices plus profonds.

Nous bondissions, ce pendant que le patron de la barque essayait de nous rançonner : sous prétexte du gros temps, il voulait faire payer double, et tout de suite. Il allait aux uns, aux autres, très agile. Un faux mouvement eût suffi pour nous faire chavirer tous. Quelques semaines auparavant, vingt-huit personnes s’étaient noyées là — de cette façon — sur la ceinture des récifs.