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LE GRAND TRIMARD

À Trieste, je pris la précaution de ne pas m’afficher en plein jour avec les camarades que j’y rencontrai fortuitement : c’étaient de fort braves jeunes gens qui publiaient le huitième numéro d’une petite feuille socialiste dont les sept premiers avaient subi le triste sort de la saisie.

Le soir on se réunissait dans une brasserie de Burgstrasse et ce n’était pas pour moi un plaisir banal de retrouver, à quelque cent lieues de Paris, les mêmes tendances de révolte, de sentir vibrer identiques des instincts et des enthousiasmes. Nous devisions jusqu’à très tard du mouvement qui se généralise, de tous ces efforts épars, multipliés et grandissants comme autant de poussées convergentes vers l’idéal de liberté.

Et les journées je les passais à flâner sur les quais où venaient atterrir les paquebots sveltes retour des rives mystérieuses.

Parmi les cris et l’incessant manège des portefaix, ce sont les lourdes balles de coton qu’on décharge, les caisses d’oranges et les