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dans un coin de mon hangar, moi dans l’autre et elle s’occupait à trier et à vendre les objets recueillis au cours de mes nuits de travail. Enfin il y a quelques jours, elle m’a dit, toute triste, qu’elle allait être obligée de marcher bientôt pieds nus, ses souliers étant plus qu’usés. Ça m’a fait beaucoup de peine, et comme je souffrais trop à l’idée de la voir marcher sans chaussures dans la boue et la neige, j’ai volé, ne pouvant l’acheter, la paire de bottines qu’on a trouvée dans ma hotte…

Pour blasés qu’eussent été les témoins, l’histoire du petit chiffonnier les aurait, je pense, intéressés. Ils eussent payé les bottines, donné quelque menue monnaie et fait renvoyer l’enfant près de la petite amie inquiète.

Le commissaire fit autre chose.


L’enfant fut jeté au Dépôt !

Deux délits lui sont reprochés. Le flagrant délit de son vol et cet autre, plus honteux encore, inscrit ainsi sur l’ordre d’écrou :

N’a pas de domicile légal.

Le hangar de la rue de Belleville, le hangar ouvert au vent, n’est pas ce que le magistrat a coutume d’appeler un domicile légal.

Un domicile légal !

L’enfant en a un maintenant.