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De plus peut-être y a-t-il, chez les affolés qui tuent, une sourde rage contre l’homme en livrée qui vient, la sacoche bourrée d’argent, exiger le pain de la nichée.


Le grand jeu des puissants du monde, toujours le même, est de créer des conflits entre les frères de misère.

Le débiteur traqué et le pauvre hère qui porte au collet les initiales de la riche banque, se regardent comme chien et loup.

Ils se détestent.

Et j’aurais du mal à leur faire sentir que, tous deux, sont également des victimes…

D’ailleurs, cette constatation n’apportant aucune solution d’ordre immédiatement pratique, les gueux continueront, je crois, — pendant encore un certain temps — à se massacrer comme de règle.

La Société vit de leur mort.


Gendarmes et vagabonds, douaniers et contrebandiers, garde-forestiers et braconniers, les gueux et les doubles-gueux laissent ainsi leur sang sur les routes, à propos des faisans du prince…

Les peuples-enfants ne se ruent-ils pas aux réciproques carnages pour des lopins de territoire