Rien ne les arrête — pas même les agents de la sûreté de l’État. Ils vont, ils vont, ils parlent, ils papotent, chuchotent et complotent en organisateurs de paniques.
Les tirages montent, la Bourse baisse.
Tout cela parce qu’un petit juif a trahi — ou n’a pas trahi.
Parce que d’autres officiers ont trahi — ou n’ont pas trahi.
Inextricable cauchemar. Ma tête s’y perd, l’émotion gagne le pays. L’heure est grave.
On raconte, on insinue, on crie que ceux des officiers en cause qui ne se sont pas livrés à l’Allemagne, se sont laissé acheter par le syndicat Dreyfus.
Les accusations s’entre-croisent, les invectives se heurtent. On n’entend plus qu’un bruit vague et ces épithètes en point d’orgue :
Espion ! Traître ! Vendu ! Mouchard !
On lance des noms, on jette des grades.
Tout est suspect, tout et tous.
S’il y a le syndicat de la défense, il y a les syndicats de l’attaque.
Que de boue ! que de boue pour l’honnête homme qui va à pied, pour le brave petit officier d’infanterie… Que de boue ! que de boue ! que