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être, puisqu’on y tenaille de la chair encore puérile, apparaisse dans son jour sinistre. C’est autre chose qu’un article à faire. Et c’est mieux qu’un réquisitoire. Ce devrait être un procès-verbal :

Aniane, colonie pénitentiaire. Directeur : M. Naret. Médecin : M. Rouveyrolis. Quatre cents colons : les plus jeunes ont à peine huit ans !

Cette colonie n’est pas, au reste, pire que les autres : Saint-Hilaire, Douaires, La Loge, Eysses, sévissent sur le même modèle. Mais c’est d’Aniane que je peux parler, en mettant les points sur les i — en mettant les noms sur les morts.

Il s’appelait Vaillanberg, celui-ci ; il avait dix-sept ans. Jeté en cellule pour une tentative d’évasion, l’enfant tomba sous la coupe d’un gardien qui l’avait en haine. Ce gardien, ce fonctionnaire, ce tortionnaire nommé Périal, poussa l’ignominie au point de priver sa victime de la portion de nourriture accordée aux enfants punis : une soupe tous les quatre jours.

Périal vida dans les latrines la gamelle du petit martyr.

Pendant trois semaines, le malheureux vécut au régime d’une mince tartine de pain que, chaque jour, on lui lançait. Et, des cellules voisines, ses petits camarades l’entendirent, de longues nuits, sangloter en demandant à manger.