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LUCIUS.


pudicité de nos prêtres ; et ceux-ci, honteux de voir leur infamie divulguée, délogent et partent sans bruit la nuit suivante. Une fois en route et loin de tout témoin, je les entendais me maudire et s’exaspérer contre moi, pour avoir divulgué leurs mystères. C’était, au reste, un mal tolérable que d’entendre leurs malédictions ; mais la suite n’était plus du tout risible. Ils m’ôtèrent la déesse de dessus le dos, la déposèrent à terre, me dépouillèrent de tous mes harnais, et, ainsi mis à nu, m’attachèrent à un grand arbre ; ensuite, ils m’entourent, et, avec des fouets garnis d’osselets, ils m’en donnent à tour de bras, jusqu’à me faire rendre l’âme, en m’avertissant de ne plus souffler mot à l’a’venir dans mes fonctions de porte-dieu. Ils eurent même la velléité de m’égorger, après m’avoir bien étrillé, pour les avoir exposés à la risée et forcés à quitter le village sans avoir gagné leur journée. Mais, à me tuer, il y avait un grand embarras, c’était la déesse, qui restait là couchée à terre, et n’avait plus moyen de voyager.

XXXIX. La correction terminée, on me rend ma déesse et nous nous remettons en route. Vers le soir, nous nous arrêtons à la maison de campagne d’un riche particulier. Le maître ^it chez lui ; il hébergea avec beaucoup d’empressement la déesse et lui offrit des sacrifices. Je me souviens que je courus là un grand danger : un des amis du maître du logis, lui avait envoyé en présent une cuisse d’âne sauvage ; le cuisinier à qui on l’avait donnée pour la préparer la perdit par sa négligence, en laissant toute une bande de chiens pénétrer à son insu dans la cuisine. Prévoyant bien que les coups, et mieux encore’ne lui feraient pas défaut, pour la porte du quartier d’âne, il résolut de se pendre. Mais sa femme, véritable oiseau de mauvais augure pour moi, l’en empêcha, a Ne va pas te tuer pour cela, mon cher homme, lui dit-elle, et ne t’abandonne point ainsi au découragement ;