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TRIBOULET

Le roi François Ier descend…

Sur le seuil de la porte ouverte, il s’arrête, scrute la nuit, entrevoit les silhouettes de ses courtisans qui l’attendent… il sourit et s’avance à leur rencontre…

— La surprise, Sire ? demande Essé.

— Vous allez voir !…

À ce moment, une ombre se détache de la nuit. L’homme vient vers le groupe des gentilshommes… Il titube en marchant… Il s’arrête… il jette des yeux hagards sur ces seigneurs… Qui est, parmi eux, le traître ?… Qui lui a volé sa femme ?… Qui a détruit son bonheur, piétiné sur son cœur ?…

— Vous êtes Ferron ? raille François Ier.

L’homme fait un effort, cherche à reconnaître celui qui parle… ses mains se crispent comme pour un étranglement… ses poings se lèvent…

— Et vous ? grince-t-il… et toi ? Qui es-tu ? qui es-tu ?…

Tout à coup, ses bras retombent.

— Le roi ! Le roi ! bégaye l’homme, écrasé.

Un rire lui répond… Il sent qu’on glisse un objet dans sa main… Il demeure un instant stupide d’horreur et de désespoir… Et quand il revient à lui, quand ses poings se relèvent dans une résolution suprême, le groupe des seigneurs a disparu dans la nuit…

Le roi et ses courtisans se sont arrêtés à vingts pas de là, curieux de ce qui va se passer.

— Comment trouvez-vous la surprise ? demande le roi François Ier.

— Admirable ! charmante !… Le Ferron fait merveilleuse figure !…

— Bah ! ricane le roi. Il se consolera avec le prix du collier que je viens de laisser là-haut.

Le mari, cependant, examine objet que le roi a glissé dans sa main.

L’amant de Madeleine vient de lui remettre la clef de la maison où s’est consommé l’adultère !… C’est la « surprise » préparée par le Roi-Chevalier !

Un râle, un sanglot d’abominable souffrance déchire sa gorge… Il mord ses lèvres pour ne pas hurler sa douleur…

Soudain, une main le touche à l’épaule.

— Me voici, maître Ferron, murmure quelqu’un. Fidèle au rendez-vous…

Ferron regarde d’un œil hébété.