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LE BOUTE-CHARGE

— Vous plaisantez, s’écria l’officier qui a fait la campagne. Si vous voulez savoir ce que c’est que la fatigue du corps et de la pensée, ce que c’est qu’un bivouac, je vous ferai lire une lettre que j’ai trouvée dans les effets d’un sous-officier, mon camarade, le lendemain de ***, et que le pauvre garçon n’a pas eu le temps d’envoyer. Du reste, ce n’est pas précisément une lettre, mais une page de notes prises sur place.

Dans la soirée, il m’apporta quelques feuillets écrits au crayon d’une main fiévreuse, maculés de boue, déchirés aux coins ; je lus et recopiai ces lignes sombres où l’échelle des émotions éprouvées est dressée avec un soin effrayant, si l’on songe au moment où elles furent écrites, et où perce un étrange pressentiment du coup de sabre mortel.


La neige.

Au loin, sur les coteaux qui ondulent, une écume grise, blafarde sous les lueurs des étoiles. Aux peupliers qui seuls, maintenant,