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LE BOUTE-CHARGE

du bruit et du silence. Il est le monstrum horrendum des prisonniers qui usent leur imagination à lui jouer des tours. Il est en lutte ouverte avec le quartier tout entier : c’est le pion auquel les élèves ne songent qu’à faire la nique, par ce seul fait qu’il est pion. Et l’on s’étonne que son caractère tourne au vinaigre ! que sa voix s’enroue et prenne des tons de fausset !

C’est pourtant un homme convaincu, que l’adjudant. Il a une véritable mission à remplir : de son zèle, de sa vigilance dépendent l’ordre, la propreté, la bonne tenue du quartier. Humbles devoirs, grosse besogne. Il est certes à plaindre ; et plus il est détesté, plus il est à estimer. Car l’antipathie traditionnelle qu’il s’attire est en raison directe de la bonne volonté, du soin qu’il met à faire son métier. — Il a tous les déboires, aucun des côtés brillants de la vie militaire. Il vit seul, n’ayant pas de peloton à diriger, à dresser, a élever. Si son âme, comme celle de tous les camarades, s’ouvre aux grandes espérances qui agitent leurs ailes rayonnantes sur le régiment, il doit se