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PRÉLIMINAIRE.

des Cipayes, né dans les États du Sonde, me donna les noms des grandes montagnes qui diviſent la preſqu’iſle de l’Inde en deux parties, Eſt & Oueſt, depuis les

    Karta plaça ces trois Dieux dans un rocher d’argent, appellé Nahou merou, rempli de délices, & y produiſit une infinité d’autres Dieux pour gouverner l’Univers.

    Comme ces trois premiers Dieux ne devoient regner qu’un certain nombre d’années ou de ſiécles (parce qu’ils étoient bornés dans leur être), Karta les fit paſſer dans le Sattialogom, pour les y faire jouir (comme un dédommagement) d’une Béatitude plus parfaite. Il les a enſuite reproduits pluſieurs fois au commencement des Mondes : de ſorte qu’il y a dans le Nahou merou Paravadam, & dans le Sattialogom pluſieurs de ces reproductions de Viſchnou, de Brouma & de Roudra.

    Le tems du regne des autres Chefs du Monde eſt auſſi fixé : après quoi, ils iront ſelon le merite de leurs œuvres dans le Sattialogom, ou bien ils renaîtront dans le Pulhoam, ſous quelque figure particuliere, pour y faire pénitence de leurs péchés.

    Karta a détruit pluſieurs fois tous les Mondes : on en eſt au quatriéme age. Après cette deſtruction toutes les ames qui ſont dans le Sattialogom retournent dans la premiere ſubſtance de Karta, & ne font plus avec lui qu’une même choſe. Les autres (ames) vont dans le Memai (l’Enfer) Monde particulier, plein de ténebres, où il n’y a ni peine ni plaiſir, & où ils attendent la production d’un nouveau Monde.

    Lorfque Karta opere cette production, il reproduit auſſi les Chefs du Nahoumerou Paravadam, & ceux qui font dans les Enfers vont de nouveau ſelon leurs mérites, habiter ou gouverner les autres Mondes.

    Les Brahmes croyent le Monde (matériel) éternel, ſans principe ; un pur eſprit ne leur paroît pas poſſible.

    La plûpart des Gentils admettent le deſtin pour le bien & pour le mal. Tout eſt reglé dès la naiſſance par Brouma, qui ſelon les mérites envoye enſuite en Enfer ou en Paradis, ou bien fait repaſſer les ames dans des corps. Ils comptent trois millions, trois cens mille Dieux grands & petits, à la tête deſquels eſt Karta ou Arianaden, l’Être ſupreme. Les Indiens croyent l’ame d’origine divine. Il n’y a chez eux ni Athée ni perſonne qui nie la vie à venir ; ſeulement au lieu de réſurrection, c’eſt une reproduction.

    On verra plus bas dans la Deſcription des Pagodes d’Iloura & de Kenery, les noms d’une partie des Divinités ſubalternes des Indiens ; je me contente d’ajouter ici quelques réflexions à l’Expoſé du P. Claude. 1°. La maniere dont les Indiens s’expriment ſur la nature de l’Être ſuprême s’accorde avec ce que me raconta, lorſque j’étois a Kandanate l’Archevêque Jacobite Schokor-culla. Un Chrétien de Kottariguire (peut-être Kottagarekaré) lui dit un jour, qu’il avoit lu dans un Livre Indien que les Divinités Malabares n’etoient que ſecondaires, créées par l’Être infini, & que c’étoit cet Être que l’on adoroit, en leur rendant des reſpects ; mais qu’il n’y avoit que les habitans des montagnes, & les Brahmes particulierement conſacrés au culte de ce Dieu, qui puſſent en parler dignement.

    2°. Ce qui diſtingue encore dans une même Caſte les Indiens les uns des autres, c’eſt la dévotion particuliere qu’ils marquent pour quelqu’un des trois Dieux ſecondaires, Brama, Viſchnou & Roudra. Le culte de ce dernier Dieu eſt le plus étendu. Le Lingam, (c’eſt-à-dire, les parties naturelles de l’homme réunies à celles de la femme,) ſous la forme duquel on l’honore, eſt le ſymbole de la Nature toujours produiſante ; tous les Êtres participent à la matiere & ſe perpetuent par l’union de ces parties, qui en elles-mêmes n’ont rien d’indigne de celui qui les