leur unique fortune, l’incendie menaçait de leur enlever leurs dernières ressources et de les réduire à la misère.
Toutefois, la grange que la flamme dévorait était assez éloignée de la ferme, et il y avait lieu d’espérer que l’incendie s’arrêterait bientôt faute d’aliment. Octave en fit l’observation à Marguerite, mais cet espoir ne devait pas être de longue durée, car au moment où le feu diminuait d’intensité du côté de la grange, la ferme s’éclaira à son tour des rouges et sanglantes lueurs de l’incendie.
Tous les assistants poussèrent à cette vue un cri de rage et de désespoir. Leurs efforts devenaient désormais inutiles : la malveillance avait allumé le feu, et elle l’entretenait avec une activité impie et cruelle.
Marguerite s’assit éplorée sur le seuil de la cour, et Octave, silencieux et morne, prit place à ses côtés.
Ils n’osaient se communiquer leurs pensées ; leur âme tout entière s’abandonnait sans partage à la douleur du moment.
Tout à coup Octave et Marguerite se retournèrent et frémirent.
![](http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/e/e8/Zaccone_-_Eric_le_mendiant_-_Un_clan_breton%2C_1853_%28page_72_crop%29.jpg/500px-Zaccone_-_Eric_le_mendiant_-_Un_clan_breton%2C_1853_%28page_72_crop%29.jpg)
Derrière eux venait de se dessiner la nerveuse silhouette du vieux Tanneguy, auquel la porte de la cour servait de cadre.
Il était pâle ; ses longs cheveux grisonnants tombaient, humides et roides, le long de ses tempes ; il s’appuyait sur son peu-bas et regardait.
Son œil était sec et brillait d’un feu sombre ; sa poitrine se soulevait péniblement ; il n’avait pas même aperçu sa fille.
Marguerite se pressait contre Octave muette d’épouvante et comme terrifiée ; elle n’osait faire un pas ni proférer une parole ; elle avait peur de ce sombre désespoir qui se peignait sur les traits décomposés du vieillard.