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ÉRIC LE MENDIANT.

— Toujours, Octave.

Il y eut un moment de silence : Octave luttait contre ses propres impressions, et cherchait encore à se tromper lui-même.

— Quand vous avez quitté Lanmeur, dit-il presque aussitôt, c’est dans cette ferme que vous êtes venue habiter ?

— Oui.

— Vous sortiez rarement, m’a-t-on dit ?

— Mon père me le défendait.

— Pourquoi cela ?

— Je l’ignore.

— Et l’idée ne vous est-elle jamais venue de lui demander la raison de cette claustration singulière ?

— Jamais.

— Que faisiez-vous donc ?

— J’attendais.

Octave se tut ; il ne savait plus que penser : toutes ces réponses étaient faites d’un ton calme et parfaitement lucides ; elles ébranlaient ses convictions, et rappelaient encore une fois le doute dans son esprit.

Une heure s’écoula dans cet entretien ; la lune montait à l’horizon, et ses pâles rayons glissaient doucement sous les allées ombrageuses. Il régnait de tous côtés un silence plaintif que troublait seul le lointain murmure de l’Océan sur les falaises. Octave et Marguerite étaient profondément émus.

Enfin l’heure du départ sonna… Marguerite avait à craindre que son absence ne fût remarquée ; son père était sévère ; il avait gardé rancune à Octave : il fallait se séparer…

Elle se leva.

Elle était belle et souriante ; son regard éclatait d’amour et de pudeur contenus ; elle tendit avec abandon ses deux mains à Octave.