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ÉRIC LE MENDIANT.

penser que la douleur avait pu égarer la raison de Marguerite jusqu’à la folie ?

Octave retomba lourdement de la hauteur de ses espérances dans la réalité, et il sentit de nouveau son cœur se briser et la confiance s’en échapper.

D’ailleurs, ce qui le confirma encore davantage dans cette pensée, que le mendiant avait calomnié le père de Marguerite, c’est que, lorsqu’il sortit de ses rêveries et releva la tête, le mendiant avait disparu, ne croyant pas devoir attendre de nouvelles interpellations.

Octave poussa un profond soupir, et reprit son chemin vers le Conquet.

Il était profondément triste : une amertume sans seconde emplissait sa poitrine ; un désespoir morne se lisait sur ses traits.

Pauvre Marguerite !… Marguerite, folle !… folle à cause de son amour.

Il ne l’avait pas vue, il lui faudrait repartir sans la voir ; il allait être contraint de s’éloigner pour toujours.

Octave comprenait qu’il valait mieux, pour son repos, pour son bonheur, qu’il en fût ainsi. Et cependant il ne pouvait se résigner à cette nécessité ; et il marchait, à pas lents, dans l’allée de tilleuls, espérant toujours vaguement que Dieu prendrait pitié de lui, et mettrait fin à son atroce douleur.

Tout à coup il s’arrêta.

Un bruit imperceptible s’était fait entendre, et Octave avait tressailli.

Une fenêtre de l’une des tourelles venait de s’ouvrir, et l’amoureux jeune homme s’était retourné précipitamment.

C’était Marguerite !

Le jour n’avait pas fui encore. Il régnait de toutes parts un calme et un recueillement ineffables ; quel-