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ÉRIC LE MENDIANT.

ques années presque aussi fréquentée que la Suisse ou l’Italie.

Mais les touristes n’ont guère visité que les lieux dont les Guides du voyageur leur indiquaient le nom et la position topographique. Ils ont parcouru les plaines de Karnac, les rives enchantées de l’Ellé, les montagnes d’Arrès ; ils se sont arrêtés à Penmarch, au Foll-Cout, à Saint-Paul-de-Léon, et bien peu ont osé pousser leur course, jusqu’aux bords de l’Océan. Les côtes de Bretagne ont rarement été foulées par le pied du voyageur, et les historiens du pays eux-mêmes ont complètement négligé d’en faire mention.

Que de ravissants paysages, que de puissantes fantaisies de la nature restent là, ignorées ou méconnues. Quel plus beau spectacle que cette longue suite d’énormes rochers que la mer, dans ses gigantesques caprices, a taillés avec un art qu’envierait le plus habile sculpteur ! De Saint-Matthieu à Saint-Paul-de-Léon le regard se lasse à admirer ; les glaciers de la Suisse n’ont pas de plus beaux aspects, les bords de la Baltique n’offrent pas de plus curieux sujets d’étude. Il y aurait tout un livre à écrire sur cette partie de la Bretagne, livre coloré, attrayant, saisissant et dramatique. Il sera fait tôt ou tard.

La ferme du vieux Tanneguy était à une demi-lieue environ de la côte, mais par sa position elle dominait, nous l’avons dit, toute cette plaine qui s’étend entre le Conquet et Saint-Matthieu ; un bouquet de petits arbres en formait une ceinture mouvante, et elle s’en dégageait coquettement pour laisser s’élever vers le ciel les petites tourelles à cul-de-lampe, dont elle était ornée : un vieux reste de la féodalité.

Octave examinait un à un tous les détails de cette charmante habitation, et son cœur battait à se rompre quand la pensée lui venait que Marguerite était là, sans doute, et que d’un moment à l’autre il pou-