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ÉRIC LE MENDIANT.

Quand il est tombé, il était déjà condamné… On l’a assassiné à froid.

— Voilà une terrible histoire.

— Bah ! fit Horace, il en sera quitte pour quelques milliers de francs de moins.

Et, sans ajouter une parole de plus, le jeune médecin se mit en devoir de panser la blessure du Breton, qui déjà, d’ailleurs, commençait à revenir de son évanouissement.

C’était, il faut le dire, une scène profondément saisissante, surtout à l’heure et dans le lieu où elle se passait.

Le paysage qui les entourait avait un aspect particulièrement triste.

Quelques champs sablonneux où poussait une végétation sans force ; çà et là, de frêles bouquets de bouleaux brûlés par les vents d’ouest ; partout une campagne nue et sans charme ; enfin, une certaine harmonie monotone et désolée, qui se composait du bruit des vagues sur les falaises prochaines, ou des plaintes du vent de mer dans les genêts.

Les deux jeunes gens s’étaient tus, en proie à mille sentiments contraires, et penchés avidement sur le patient, ils épiaient chacun de ses mouvements, attendant avec une anxiété mortelle qu’il revint à lui !

Le Breton ne se fit pas longtemps attendre ; il agita d’abord ses deux bras, comme au sortir d’un long sommeil, passa à plusieurs reprises sa main sur son front et dans ses cheveux, et promena enfin son regard effaré autour de lui :

— Où suis-je ?… demanda-t-il d’une voix faible.

— Près de deux amis, répondit Horace, et surtout près d’un médecin que Dieu avait envoyé là pour vous sauver.