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ÉRIC LE MENDIANT.

c’était son surtout de drap piqué que la vieille allait déposer dans un grand bahut sculpté, et son regard caressait avec amour les contours délicieux de sa taille ; mais ce fut surtout lorsque Jeanne détacha le nœud qui retenait ses cheveux et qu’elle les sentit retomber en longues boucles sur ses épaules et son sein nus, qu’elle se prit à rougir, croisant ses deux bras sur sa gorge naissante par un geste plein de pudeur.

Elle était si belle ainsi ! Il y avait dans sa pose tant de chasteté et de beauté ; son regard à demi voilé étincelait de tant d’amour contenu et de tant de pudeur, que la vieille Jeanne s’arrêta un instant pour la contempler et l’admirer. Elle était belle, et sainte, et pure ; le vent des passions terrestres n’avait point encore soufflé sur cette frêle enveloppe ; son cœur était aussi pur que son âme, son âme était aussi blanche qu’au sortir des mains de Dieu !

Quand Marguerite vit que Jeanne restait debout devant elle, plongée dans une admiration muette, elle jeta un petit rire, vif et doux comme un cri d’oiseau, et alla elle-même prendre un long vêtement de toile blanche, puis, s’étant assurée que tout aide étrangère lui était désormais inutile, elle congédia Jeanne, et demeura seule.

Alors, elle se reprit encore à songer à son départ, essaya de mettre en ordre tous les objets qu’elle allait emporter, et comme l’horloge de Lanmeur sonnait onze heures, elle alla s’agenouiller près de son lit, et commença sa prière, les mains jointes, les yeux levés au ciel.

Mais à peine eut-elle commencé, qu’une émotion fébrile fit trembler ses mains, elle baissa les yeux, et s’étant détournée avec vivacité, elle aperçut un homme debout au milieu de la chambre.