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ÉRIC LE MENDIANT.

Mais lorsqu’il aperçut le mouvement du mendiant, quand il vit que sa main s’était armée tout à coup du pistolet qu’il venait de retirer de sa besace, et qu’il paraissait disposé à en faire usage, sa colère se ranima instantanément, ses mains se crispèrent et d’un coup de peu-bas vigoureusement appliqué, il fit tomber à ses pieds le pistolet du mendiant.

Éric fut comme abasourdi de cette soudaine attaque, il se releva d’un bond, et se jeta avidement sur le pistolet qui venait de lui échapper.

Mais déjà Tanneguy avait eu le temps de poser le pied sur l’arme, et son bâton s’était aussitôt relevé :

Éric le regarda stupidement, ne sachant pas trop s’il devait reculer ou avancer.

— Vous êtes un misérable, maître Éric, dit enfin le vieux Breton, mais cette fois d’une voix plus calme, et si je n’avais écouté que ma colère, j’aurais vengé, d’un seul coup, tous les honnêtes gens de la commune, que vous avez calomniés, comme ma pauvre Margaït… mais vous ne perdrez rien pour attendre, je vous le prédis, si vous continuez à vous faire ainsi le digne instrument des vengeances du château.

Et comme Éric, muet et immobile, ne quittait pas des yeux le pistolet sur lequel Tanneguy avait mis le pied :

— Prenez-y garde, poursuivit ce dernier en lançant d’un coup de peu-bas l’arme dehors la cabane, prenez-y garde, maître Éric, vous jouez là un vilain jeu, qui vous conduira peut être plus loin que vous ne voudriez aller… C’est tout ce que je puis vous dire, aujourd’hui ; mais nous pourrons renouer cette conversation, si le désir vous prend jamais de revenir rôder autour de la ferme !…

En parlant ainsi, Tanneguy gagna la porte, et disparut bientôt dans le sentier de Kerhor.