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ÉRIC LE MENDIANT.

lui servaient de lit, et la cabane n’avait pas d’autre ornement, si ce n’est un mauvais escabeau boiteux, que le mendiant devait à la charité des domestiques du château de Kerhor.

Quand Tanneguy fut entré, Éric s’allongea sur sa botte de paille, son peu-bas à gauche et sa besace à droite. Il avait fait ses réflexions : il avait deviné tout de suite ce dont il s’agissait, et il était décidé à affronter jusqu’au bout la colère du vieux Breton ; il n’ignorait pas que Tanneguy était violent, emporté, et qu’il ne s’arrêterait peut-être pas devant les conséquences extrêmes de son emportement ; mais le mendiant se sentait fort, et, au surplus, il n’était pas fâché, que le hasard lui offrit l’occasion d’avoir une explication décisive avec le père de Marguerite.

Il n’éprouva donc aucune émotion en voyant entrer ce dernier, et un sourire presque ironique vint même effleurer ses lèvres, lorsqu’il s’aperçut que Tanneguy parcourait silencieusement la cabane, sans savoir probablement de quelle façon entamer l’entretien.

Éric eut pitié de lui ; il alla au-devant de ses désirs et commença :

— Vous avez désiré me parler, monsieur Tanneguy, dit-il, me voilà tout prêt à vous écouter, et à vous rendre tous les services qu’un pauvre mendiant comme moi peut rendre. Je connais bien du monde au pays et ailleurs, sans me vanter, et si c’est pour avoir des renseignements sur quelque bonne terre à acheter, je suis votre homme.

— Ce n’est pas de cela qu’il s’agit.

— Et de quoi donc ? demanda le mendiant avec une naïveté feinte.

— Il s’agit de vous, et de vous seul, poursuivit Tanneguy, dont les joues se colorèrent vivement, et qui frappa le sol de son énorme peu-bas.