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ÉRIC LE MENDIANT.

— Mon ami, lui dit-il, je me suis promis de vous dire toute la vérité, et je ne veux vous en rien cacher. Éric a dit, et je vous le répète, pour vous mettre à même de prendre des mesures qui fassent cesser de telles calomnies, Éric a dit que depuis plusieurs mois vous receviez fréquemment chez vous un jeune homme que sa position sociale devrait au contraire éloigner de Margaït.

— Octave !… balbutia Tanneguy.

— Octave ! répéta le curé ; je sais moi, et tous vos amis savent aussi que le jeune Octave passe chez vous, qui êtes le fermier de sa mère, quand le désir d’aller chasser dans les environs l’a réveillé de bonne heure ; mais Éric voit les choses autrement, et il les répand avec des commentaires qui peuvent nuire à la réputation de Marguerite.

— Le misérable !… grommela Tanneguy en enfonçant ses ongles dans la table.

— Voilà ce qu’il dit, mon ami ; il est triste, il est douloureux, d’avoir à défendre une enfant aussi pure que Marguerite de pareilles indignités, mais malheureusement, plus les calomnies sont absurdes, plus elles trouvent de crédit auprès de nos paysans… Vous y aviserez… et dans peu, j’en suis sûr, il n’en sera plus question…

Tanneguy ne répondit pas : son œil s’était ardemment fixé au parquet ; une pâleur livide s’était répandue sur ses joues, son cœur battait à se rompre.

Il se leva.

— Monsieur l’abbé, dit-il alors d’une voix profondément émue, je vous remercie pour Marguerite et pour moi, vous avez le courage de me dire la vérité, et maintenant je comprends bien des choses que je ne parvenais pas à m’expliquer.

— Quelles choses ? fit l’abbé.

— Oh !… des riens ; les sourires des uns, l’air