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"Tu as donc suivi la voiture où monseigneur avait caché ses prisonnières ?

— Oui, mon oncle. Jusqu’à la rue de la Hache.

— Quelqu’un t’a-t-il vu ?

— Je crois que monsieur d’Aspremont a dû m’apercevoir. Mais je ne pense pas qu’il m’ait reconnu.

— Et quelle était ton idée en suivant la voiture ?

— Rien. Je voulais voir, voilà tout.

— Et tu as vu ce que tu ne devais pas voir, mon garçon !

— Hélas ! je m’en repens bien, mon digne oncle !

— Bon. Maintenant, dis-moi, fripon, dis-moi, misérable, quel démon t’a poussé à raconter ce que tu n’aurais jamais dû voir aux deux damnés Pardaillan ?

— Ce n’est pas un démon. Je voulais sauver mes oreilles, mon oncle.

— Ah ! misérable lâche ! Tu voulais sauver tes oreilles, alors que je te donnais l’exemple ! Alors que j’offrais toute ma fortune, ce dont je fusse mort de chagrin si on l’eût acceptée ! Sais-tu bien, infâme, quels malheurs ta trahison va attirer sur mon illustre maître ?

— Hélas ! pardonnez-moi, mon oncle !

— Et moi-même, que vais-je devenir ? Que vais-je répondre à ce puissant seigneur lorsqu’il va me demander des comptes ? "

Le vieux Gilles était sincère. Il avait laissé tomber sa tête dans ses deux mains et se demandait s’il ne valait pas mieux mourir que d’avoir à essuyer la colère du maréchal.

Cependant, il avait un témoin de sa résistance et de sa parfaite innocence. Ce témoin n’était autre que Gillot lui-même. Gillot était donc précieux à conserver.

"Ecoute ! dit-il en relevant la tête. Je ne te condamne pas à mort. Monseigneur prendra à ton égard telle décision qui lui conviendra. Mais il faut que je punisse ta lâcheté, ta trahison qui me met moi-même au pied du gibet, sans compter qu’elle me déshonore. Note que je ne te parle pas des trois mille livres qui manquent dans mon coffre…

— Mais ce n’est pas moi ! hurla Gillot.

— Que je ne te parle, continua Gilles impassible, du