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A mesure que chaque pile reprenait sa place dans le coffre, un nouveau soupir s’étranglait dans la gorge de Gillot tandis que l’oncle comptait :

"Encore quinze mille… encore douze mille…"

Le total baissait de plus en plus, à mesure que les écus étaient réintégrés.

L’opération, comme on le pense, dura longtemps. Commencée vers deux heures, elle s’acheva vers cinq heures du soir.

Or, cette opération s’accomplissait en même temps que le roi Charles IX faisait sa rentrée dans Paris, en même temps que les deux Pardaillan se battaient rue Montmartre contre les mignons de Damville.

Donc, l’oncle Gilles annonçait le total à mesure que les piles d’or et les piles d’argent s’entassaient dans le coffre.

"Il ne manque plus que cinq mille livre… plus que quatre mille… plus que trois mille…"

Gillot qui venait de placer délicatement le dernier écu et de pousser un dernier soupir, Gillot regarda autour de lui et ne vit plus rien.

Le carreau apparaissait donc tout entier : il n’y avait plus un seul écu.

"Comment dites-vous, mon oncle ? fit Gillot.

— Je dis qu’il ne manque plus que trois mille livres."

Gillot se fouilla et tira de sa poche l’écu, les deux sols et les six deniers qui constituaient sa fortune personnelle. Héroïquement, il les tendit au vieillard qui s’en saisit, les fit disparaître, et dit :

"Après !…

— Après, mon oncle ?

— Oui, les trois mille livres !

— Mais je n’ai plus rien, mon oncle !

— Allons, dépêche-toi, sans quoi je te fouille !

— Fouillez-moi, mon bon oncle… je n’ai plus rien ! "

Gilles étouffa un grognement de désespoir, palpa de ses mains tremblantes les vêtements de Gillot, et une sueur froide pointa sur son crâne. Gillot ne mentait pas !…

"Déshabille-toi ! "

Gillot obéit, plus mort que vif. LE vieux Gilles examina chaque vêtement, sonda les coutures, retourna les poches, déchira les doublures… Il dut se rendre enfin à l’horrible vérité :