mains, il ramassa de la poudre et en fit une traînée qui se prolongea le long de trois pièces ouvertes. Alors il revint prendre le flambeau et s’en alla. Il agissait et marchait en rêve. Il n’y avait qu’une idée claire en lui, mais claire, lumineuse, d’une éclatante lumière : sauver Giselle !
En passant, il prit Giselle dans ses bras et l’emporta. Parvenu à la naissance de la traînée de poudre, il se baissa et laissa tomber le flambeau : la poudre crépita. Déjà Capestang descendait l’escalier qui menait à la porte donnant sur le parc. Giselle ne pesait pas dans ses bras. Il descendait par bonds, sûr d’être dans le parc avant que n’éclatât l’explosion.
Et tout à coup, il se heurta à cette porte ! Et un rugissement de rage, de fureur, d’horreur, de terreur gronda sur ses lèvres livides : la porte était fermée ! Et, de l’autre côté il entendait les voix d’une autre bande ! Il croyait avoir tout détruit, et là, là ! derrière cette porte ! derrière cette issue unique, suprême, des vociférations éclataient ! Et il reconnaissait la voix de Concini !
Capestang s’arrêta, les yeux hagards, inondé de sueur glacée. Un sourire d’infinie détresse, une seconde, erra sur ses lèvres ; puis son regard, doucement, se posa sur Giselle. À ce moment, elle ouvrit les yeux, et elle aussi, sourit !
Et ce fut dans cet instant que retentit le fracas de l’explosion. Capestang eut cette étrange et vertigineuse sensation qu’il allait s’engloutir dans la terre ; il vit chanceler les murs, il vit la porte enfoncée, repoussée au loin par le déplacement d’air ; les débris commencèrent à pleuvoir, et tous deux, elle et lui, dans ce fracas, dans ces sifflements de l’incendie qui naissait, couverts de plâtras, lui la protégeant de son corps, de ses bras, de tout lui-même, dans cette minute, ils furent sublimes.
"N’ayez pas peur, dit Capestang d’une voix calme.
— Maintenant, je n’ai pas peur", répondit Giselle.
.. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. ..
Devant l’explosion, Concini et sa bande sautèrent les marches du perron disloqué. On eût dit que la couche d’air déplacé les poussait comme un vent de tempête. En réalité, c’était la peur. À vingt pas de là, Concini se ressaisit, et alors une idée affreuse le tenailla, le saisit au cerveau, et il poussa un cri d’angoisse désespérée :
"Morte ! Elle est morte !
— Non, monseigneur ! Regardez ! Là ! sur le perron !
— Elle n’est pas seule ! Un homme ! Un homme est là !
— Rinaldo ! Rinaldo ! Est-ce toi ?"
Un coup de vent saisit le tourbillon de fumée qui enveloppait