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Et il lut !

Dans le même instant, Cogolin le vit chanceler et devenir livide ; il vit le parchemin trembler dans ses mains convulsivement crispées. Capestang lut jusqu’au bout, mot à mot ! Et alors un cri terrible retentit.

"Ciel et terre !" hurla Capestang dont les deux poings serrés se dressèrent au ciel.

En même temps, d’un geste foudroyant, il écarta Cogolin, qui s’écroula anéanti de stupeur. Il se rua dans l’escalier. Il bondit jusqu’à l’écurie. Jeter un mors dans la bouche de Fend-l’Air, ce fut l’affaire de quelques secondes.

Et Capestang, sans se donner le temps de seller l’animal, sautait sur son bon cheval. Pour la première fois depuis qu’il le montait, il lui enfonçait ses deux éperons au ventre. Fend-l’Air s’élançait en poussant un hennissement furieux, renversant du poitrail un valet qui passait.

L’instant d’après, on put voir sur la route une sorte de trombe, un ouragan lancé avec la vitesse vertigineuse et la folie d’allure des ouragans et des trombes. C’était Fend-l’Air, le gigantesque, l’apocalyptique Fend-l’Air qui courait en tempête vers Meudon !

Ivre, fou furieux, livide, Capestang, sur ce cheval sans selle qu’il labourait à coup d’éperon, passait comme un météore. Il râlait ! Fend-l’Air râlait ! À eux deux, ils n’étaient qu’un râle et qu’une tempête ! Et dans cette prodigieuse randonnée, où il semblait vraiment que Fend-l’Air eût des ailes, le chevalier se rugissait :

"Trop tard ! Trop tard ! Trop tard !"


La première idée de Giselle d’Angoulême, lorsqu’elle eut pénétré dans le château de Meudon, lorsqu’elle eut laissé se refermer lourdement la porte massive, fut de courir à l’issue qui donnait sur le perron du parc abandonné. En quelques instants elle eut atteint l’autre porte, et elle la ferma solidement. Il y avait une fenêtre du rez-de-chaussée dégarnie de barreaux - celle-là même par où Concini était entré la nuit où il avait enlevé la jeune fille. Giselle était forte et vaillante. La terreur, du reste, décuplait ses forces - non la peur de la mort : la peur de retomber aux mains de Concini. Elle savait que Concini finirait par entrer. Elle voulait seulement gagner du temps, ne fût-ce qu’une heure, pour décider sur son propre sort... Et elle barricada la fenêtre.

Alors, d’un effort terrible de pensée, la guerrière assiégée