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jusqu’au fond de l’âme de sa conduite, mais qu’il est tenté de se réjouir de cette conduite qui le déshonore, puisqu’elle permet à Giselle d’épouser le plus noble chevalier de ce temps !"

Capestang poussa un cri, se couvrit les yeux d’une main et alla retomber sur le bord de son lit. Cinq-Mars s’élança légèrement dans l’escalier. Une minute plus tard, il sortait de l’auberge.


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Cinq-Mars s’avança d’un bon pas vers la rue de Tournon. Il avait le cœur léger, l’esprit soulagé ; il souriait à l’avenir ; il souriait à Marion, dont l’image adorée l’escortait. Tout à coup retentit un coup de sifflet. Des haies qui bordaient la route surgirent des ombres pareilles à ces démons qui bondissent dans les tableaux des primitifs ; en un instant Cinq-Mars fut entouré ; il tira l’épée, décidé à vendre chèrement sa vie ; l’idée d’appeler Capestang à son secours traversa son cerveau comme un éclair. Dans cet instant, une voix cria :

"Capestang, vous êtes mort si vous résistez !

— Capestang ! rugit Cinq-Mars en lui-même. C’est à Capestang qu’on en veut !"

Et dans cet inappréciable espace de temps que dure ce que dure une pensée, un souffle de dévouement et d’héroïsme passa sur lui. Confirmer les assaillants par un mot quelconque dans cette idée qu’il était bien Capestang, se dévouer une fois pour celui qui s’était si souvent dévoué ! Et il frappa au hasard en répondant :

"Vous allez voir comment meurt un Capestang !"

Nos lecteurs savent ce qui advint de la fin de cette aventure, et que Cinq-Mars, bien et dûment garrotté, jeté sur un cheval, fut conduit au Louvre pour être amené devant le roi !


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Revenons maintenant à notre aventurier que les dernières paroles de Cinq-Mars avaient frappé de stupeur - et de douleur. En effet, rien ne pouvait autoriser Capestang à imaginer une vraisemblance quelconque à la prédiction de son nouvel ami.

"Cinq-Mars, se disait-il, a voulu me jeter une consolation. Il s’est aperçu que j’aime Giselle. Et comme il est heureux dans son amour, il ne voit que des gens heureux autour de lui. Allons, tâchons, pour la troisième fois, de reprendre notre somme, c’est ce que j’ai de mieux à faire. Puis, demain, il faut que je m’occupe de trouver de l’argent. Nous sommes ruinés, à ce que dit Cogolin. Ce diable de Cogolin compte comme un marchand de la friperie. Il n’y a pas moyen d’échapper à ses calculs. Et cet imbécile qui a été jeter à un charlatan mes cinq dernières pistoles !"

Il jeta un regard indifférent sur le parchemin roulé en boule qu’il avait envoyé dans la chambre, la prière écrite par Lorenzo, la prière à Mercure ! Puis, haussant les épaules, il s’étendit tout habillé sur le lit. Ce fut sans doute grâce à cette stupeur et à