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à l’instant même changer de logis. (Condé respira.) Monsieur l’officier, vous escorterez monseigneur jusqu’à la quatrième du Puits qui, désormais, servira d’appartement à monseigneur... Le logement est d’ailleurs de ceux qui sont affectés aux princes ; malheureusement, sa fenêtre donne sur une cour intérieure."

Condé, pleinement rassuré et tout heureux d’en être quitte à si bon compte, fit signe que peu lui importait.

"Mais, monsieur, dit alors l’officier, la quatrième chambre de la tour du Puits est occupée, vous le savez. Où mettrons-nous le prisonnier qui y loge ?

- Eh, mais c’est bien simple : vous le mettrez ici !"

Il y eut des allées et venues. Condé, entouré de gardes, descendit, traversa des cours, attendit une demi-heure dans un corps de garde, puis monta un escalier et finalement se vit enfermé dans une grande pièce qui ressemblait à celle qu’il venait de quitter comme une chambre d’hôtellerie ressemblent à une autre. Seulement, l’hôtellerie s’appelait la Bastille. Seulement, aussi, au lieu de jouir du panorama des environs de Paris, monseigneur n’eut désormais que la vue d’une cour étroite et fort sombre.


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Si maintenant, avant de quitter la Bastille, nous revenons un instant à la quatorzième du Trésor, nous pourrons jeter un coup d’œil sur le prisonnier qui vient de prendre la place du prince de Condé.

C’est un homme d’environ quarante-cinq ans, jeune, malgré les cheveux blancs, la bouche amère, la figure exsangue. Si un être humain peut dans son attitude traduire l’idée de désespoir poussé jusqu’à la plus morne indifférence pour tout ce qui l’entoure, c’est cet homme. S’est-il aperçu seulement qu’on l’a changé de prison ? Assis à cette table où tout à l’heure était assis le prince de Condé, les yeux fixés sur la lumière jaune du flambeau, sans un geste, sans un frisson, quelle effroyable méditation peut ainsi le pétrifier ?

Parfois, il se lève, il parcourt deux ou trois fois sa cellule dans sa plus grande largeur, et, brusquement, alors, un afflux de sang empourpre cette tête ; un orage se déchaîne dans cet esprit ; ces yeux flamboient ; ces bras inertes se dressent, tordus dans un geste d’imprécation ; ces lèvres crispées par le désespoir se détendent. Puis la crise de rage se fond dans un blasphème. Et alors, un sanglot soulève sa poitrine ; ses doigts amaigris se crispent sur ses yeux, et, à travers ces doigts, les larmes glissent. Et il murmure :