à Giselle d’Angoulême mourra dans les trois jours. Quiconque tuera Adhémar de Trémazenc, chevalier de Capestang, mourra dans les trois jours. »"
Concini s’effondra dans son fauteuil.
"Mais alors bégaya-t-il, ivre de rage, d’amour, de haine, oh ! mais alors, elle m’échappe ! Je dois donc consentir à mourir ! Eh bien...
— Tais-toi ! gronda Léonora, Lorenzo a dit autre chose encore."
Elle souffrait affreusement. D’une main elle essayait de comprimer les battements de son cœur, de l’autre elle pressait son front pâle comme l’ivoire. Ainsi Concini aimait assez cette fille pour risquer la mort ! Il le pensait ! Il allait le dire ! Ce fut une des heures les plus effrayantes dans vie de cette femme qui en connut de si terribles. Elle se remit un peu, essuya la sueur glacée qui coulait sur son visage. Concini, haletant attendait sans un regard de pitié pour cette douleur.
"Qu’a dit encore Lorenzo ! rugit-il. Parle ! Tu veux donc me faire mourir toi-même !
— Il a dit, répondit Léonora d’une voix morne, il a dit encore ceci : « Seul un roi peut, sans danger, toucher à ces deux êtres ! »
— Un roi !" murmura Concini pantelant.
Léonora Galigaï se leva. Une sorte de calme étrange, fatidique était descendu sur elle. Ses attitudes avaient on ne sait quelle sérénité de sacrifice accompli jusqu’au bout. Ses yeux noirs dégageaient une douceur d’amour absolu.
"Concino, dit-elle, maintenant, tu me connais ! Maintenant, tu sais ce que vaut Léonora Galigaï ! Maintenant, tu sais pourquoi je t’ai arraché Capestang et Giselle. Seul un roi peut toucher à ces deux êtres sans danger de mort. Je ne veux pas que tu meures, mon Concino. Et comme tu mourrais si tu portais la main sur Capestang, comme tu mourrais aussi si Giselle t’était enlevée pour toujours, il faut que tu sois roi !"
Elle garda un instant le silence, pensive, tandis que Concini la contemplait avec une sorte de respect superstitieux !
"Va maintenant, mon Concino. Laisse-moi travailler à ta royauté c’est-à-dire à la satisfaction de ton amour et de ta haine. Va, laisse-moi, car je suis au bout de mes forces."
Concini éperdu, ébloui, livide de joie, de terreur, d’espérance, Concini se leva et, lentement s’approcha d’elle, cherchant un mot, un geste de reconnaissance. Mais elle l’arrêta et simplement répéta :
"Va !"
Il s’en alla, docile, courbé, comme il eût obéi à la voix d’une puissante magicienne. Lorsqu’il fut sorti, Léonora Galigaï retomba dans son fauteuil évanouie.