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— Comme tu es bien toujours le fils du félibre, mon chéri !

Au fond, elle éprouvait un trouble bizarre. Le point de vue d’où son jeune mari envisageait les besognes matérielles des femmes à la maison ne lui échappait pas. Et il différait tellement du sien qu’elle y discernait nettement, non seulement la condamnation de ses théories propres, mais de tout le cours même de sa vie. Cette poésie initiale qui naît des plus modestes travaux parce qu’ils créent dans la maison une atmosphère sereine, paisible, harmonieuse, un bien-être indistinct : l’ordre, en un mot, elle avait refusé à Denis de s’y sacrifier. Elle ne le regrettait pas. En ce jour gris d’octobre, à l’heure où ils gravissaient côte à côte les escaliers du Sacré-Cœur, elle se confirmait avec une frénésie secrète dans les raisons qu’elle avait de poursuivre sa belle carrière, et d’assurer ainsi l’aisance, le bien-être matériel de leur ménage. Elle avait sa façon à elle de le créer, en se faisant de solides appointements, ce qui valait bien celle de sa belle-mère. Est-ce que cela ne revenait pas au même ? Sans l’apport de son gain, auraient-ils pu louer ce bel appartement de la Porte de Saint-Cloud ? Mais Denis était trop entier dans ses opinions ; trop entêté. Il méconnaissait tous les charmes de la vie qu’il devait à la situation de sa femme. Là dedans aussi on aurait pu trouver une poésie. Ne serait-ce que de vivre sans barguigner perpétuellement, sans discuter à propos de la moindre dépense ainsi que cela se passait chez les parents Braspartz ?

Toutes ces pensées, Geneviève s’y complaisait Sans les exprimer. Pour rien au monde, elle n’eût consenti à les livrer au cher compagnon qui ne l’attaquait pas ouvertement. Ses rêves ordi-