Page:Yver - Madame Sous-Chef.djvu/71

Cette page n’a pas encore été corrigée

sentait très bien qu’ils tomberaient d’accord sur tout, elle et lui. Il n’était pas jusqu’à cette similitude de leurs noms, Denise, Denis, qui ne créât entre eux un lien pur comme une parenté. Serait-il jamais aussi heureux avec Geneviève que Charleman l’était avec cette douce et poétique jeune femme ? « Pourtant, songeait-il en prolongeant sa cigarette après le dîner, je n’aurais jamais eu l’idée d’épouser Denise ; tandis qu’au seul nom de Geneviève Je suis bouleversé de la racine des cheveux à la pointe de mon soulier ! »

Les trois amis ne se quittèrent pas sans une pointe d’émotion en se disant adieu jusqu’au surlendemain.

Rousselière se hâtait d’aller rassurer sa mère, rue de Varenne, et pour l’instant se rassurait lui-même sur l’inquiétude où il l’avait laissée. Après tout elle avait l’habitude depuis quelques semaines de l’attendre en vain jusqu’à huit heures passées. Tant de fois les Braspartz avaient retenu à dîner ce fiancé dont tout le monde raffolait ! « J’ai une mère gentille, se disait-il. Elle comprend tout ! »

Il ne la voyait pas dans l’étroit salon d’où le buste du félibre, avait disparu, tassée comme une vieille femme au creux d’un petit fauteuil, les coudes aux genoux et ses deux poings serrés sur ses yeux. C’était, ce soir, le dernier dîner qu’ils devaient faire en tête-à-tête, le lendemain les Braspartz fêtant chez eux le mariage civil.

Au coup de la sonnette, elle se détendit comme un ressort d’acier, se passa rapidement sur les paupières la houppette à poudre, ouvrit la porte devant l’ingrat qui disait :

— Pardonnez-moi, mon amie chérie, je suis bourrelé de remords. Mais les Charleman m’ont retenu à dîner. Vous comprenez, c’était la dernière fois…

— Si je comprends ! dit la mère.