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je ne vous comprends pas. Vous qui prétendez m’aimer…

— C’est parce que je vous adore, Geneviève, que je ne puis supporter la perspective de cette vie où vous continueriez le travail extérieur ajouté aux besognes de la maison. Une existence double qui divise une personnalité féminine, c’est exténuant.

— Comme les hommes comprennent mal ces choses ! Mais mon cher, je pourrai me payer une excellente domestique qui tiendra très bien au foyer la place que vous voudriez m’y assigner. Exigeriez-vous de ne pas goûter à une autre cuisine que la cuisine faite par mes mains de Rédacteur désaffectée ? Si encore nos deux professions se trouvaient séparées et que j’eusse un emploi éloigné du vôtre ! Mais nous serons dans la même Administration, Rousselière, dans la même Direction : et si l’envie vous prend, au long du jour, d’apercevoir le visage que vous avez la gentillesse d’aimer, si le temps vous dure de le retrouver, vous n’aurez qu’une porte à pousser, cher ami, et vous obtiendrez le sourire désiré. Voyons, est-ce que ce ne sera pas une existence charmante ?

— Vous me confondez, Geneviève ; vous m’affolez. On dirait à vous entendre que la vie essentielle, la vie primordiale, c’est au Ministère qu’elle réside ; que la vie professionnelle dans laquelle je ne vois qu’un moyen, est pour vous le but, alors que le Foyer, comme son nom le dit, c’est le centre capital d’où nous tirons notre chaleur, notre lumière, notre feu vital. Le Foyer dans l’Antiquité : trois pierres au fond d’un âtre sur lequel planaient les divinités domestiques, les âmes des ancêtres. Et, comme gardienne de la flamme, la Femme, prêtresse de la famille, dont la présence donnait au Foyer la puissance d’une forteresse mystérieuse. Vous savez, chérie, depuis l’Antiquité, beaucoup de