Page:Yver - Madame Sous-Chef.djvu/263

Cette page n’a pas encore été corrigée

rire triomphant, vous avez encore la ressource de vous convaincre que c’est à vos petits enfants qu’elle a consenti son renoncement. Vous étiez trois ici à l’appeler au nid. Dites-vous bien cela, mon garçon.

Geneviève revenait avec le café. Les petits dormaient encore. On emplit les tasses, on fuma des cigarettes. Ce furent des minutes heureuses et silencieuses où ces êtres, qu’aucune arrière-pensée ne divisait plus, se voyaient pour ainsi dire en pleine lumière jusqu’au fond de l’âme. Lorsque le petit Jacques ayant poussé quelques cris, Denis se leva pour aller le calmer, Geneviève à son tour resta en tête à tête avec sa belle-mère, qui lui demanda :

— Vrai, ma fille, vous ne regrettez rien ?

— Oh ! non, ma mère, je vous l’affirme, je n’ai jamais été si heureuse.

— Vous êtes heureuse ? répéta la veuve du félibre comme pour la pousser à une confession plus absolue.

— Oui, je suis heureuse, bien heureuse, ma mère.

— Geneviève, dit la Provençale se mordant la lèvre, car elle était terriblement émue et n’en voulait rien laisser paraître, à partir d’aujourd’hui ne dites plus « ma mère ». Dites « Ma chère amie », comme Denis, car je suis votre meilleure amie et je voudrais vous devenir chère.

Elles s’embrassèrent là-dessus, longuement. Le mari rentrait dans la pièce, il resta cloué une seconde. Puis l’on but une seconde tasse de café.

Geneviève prononça à mi-voix :

— Ma chère, ma très chère amie, je suis heureuse.

FIN

paris. — typographie plon, 8, rue garancière. 1943. 55370.
Autorisation n° 11 190.