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cette âme. Il ne connaissait pas Geneviève. Elle n’était pas non plus allée jusqu’au bout d’elle-même. C’est aujourd’hui seulement qu’elle lui était révélée avec toutes ses perfections. Et il se jugeait indigne d’elle pour l’avoir méconnue. On alla prendre le café dans le studio né de l’ancienne salle à manger. Une baie plus grande que la pièce, eût-on pu dire, tant elle était disproportionnée avec les dimensions de celle-ci, n’ouvrait plus ici, comme là-haut, sur les perspectives des collines boisées, mais sur celle d’un grand mur coupé des fenêtres obliques d’un escalier. Pendant que Geneviève préparait le plateau, Mme Rousselière, seule avec son fils, murmura :

— Mon cher ami, je suis bouleversée. Votre femme est merveilleuse, à se mettre à genoux devant elle. Cette créature-là possédait donc tous les dons ! Et le plus beau cette bonne grâce qui fait les choses comme en se jouant. On se demande si ce n’est pas dommage… Oui ; à quoi ne serait-elle pas arrivée au Ministère ! Et puis après tout, tant pis. Il se trouvera toujours un homme intelligent pour la remplacer, alors que près de vous et de vos enfants, personne au monde ne pouvait tenir son rôle. Denis était un peu trop ému, un peu trop accablé encore par l’étendue de son bonheur. L’obsession d’avoir envié Charleman à cause de Denise le tourmentait sans cesse.

— Est-ce qu’elle ne regrettera pas ? demandait-il à sa mère. Est-ce que toutes les jouissances intellectuelles, les succès qu’elle connaissait là-bas ne reviendront pas hanter ses souvenirs ? Et moi, est-ce que je suis digne d’un tel sacrifice ? Est-ce que j’en valais la peine ? Est-ce que par ma pression tenace je ne lui ai pas, à la longue, extorqué cette abdication ? En avais-je le droit ?

— Si cette idée vous tracasse, dit la mère au sou-