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— Ma grande Braspartz !

C’était son propre frémissement devant le sacrifice dont il semblait ne mesurer qu’aujourd’hui la profondeur et la cruauté. Il n’avait pas encore compris jusqu’ici que ce qu’il réclamait inlassablement depuis des années c’était l’anéantissement de la vraie Geneviève. Il restait confondu.

— Ma femme chérie, articula-t-il tout bas, si à ce prix tu devais moins m’aimer, je préférerais…

— Mais, mon pauvre chéri ! et Geneviève se leva pour venir l’entourer de ses bras, ne comprends-tu pas que c’est justement afin que nous puissions nous aimer davantage si je lâche tout !

— Tu regretteras, chérie ! j’ai peur que tu ne regrettes…

— Écoute, dès maintenant, dès ce soir, j’ai cessé déjà de rien regretter. Je n’aurais jamais cru que ce fût si facile… Sans cela, voici longtemps…

Ils étaient l’un devant l’autre comme au premier jour de leurs noces.

Un changement de ministre, un renversement du Cabinet laisse bien peu de traces dans les bureaux en regard du bouleversement des esprits que déclencha dans ce département-là le bruit de la démission de Geneviève Rousselière. « Pour une fois que nous avions une femme de valeur !… » déclara le « Potentat » furieux. Une plantonne bougonna : « Les bons s’en vont !… » Les petites dactylos, leur bâton de rouge au bout des doigts, interrompaient la rectification de leur lèvre inférieure pour opiner : « Et puis voilà, Rousselière elle était chic, il n’y a pas à dire. » Au Pavillon du Contentieux, le chef ne décoléra pas de huit jours. Les garçons de bureau, échangeant confidentiellement leur manière de voir dans l’antichambre,