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moment, je ne t’ai pas souvent demandé ton avis jusqu’ici, ayant l’habitude de trancher moi-même les questions qui se posaient devant ma route. Mais celle qui se présente aujourd’hui à moi entraîne de telles conséquences que j’hésite encore. Il s’agit ni plus ni moins que de savoir si je vais ou non demeurer dans l’Administration.

Elle crut qu’il allait sursauter. Il demanda seulement, sur ces notes chantantes de l’accent breton qui sont si péremptoires, qui vont si loin au delà des mots prononcés qu’elles contiennent la réponse affirmative à la question posée :

— À cause de ton mari ?

— Oui, à cause de Denis et aussi de mes petits garçons.

Et il y eut un silence bien lourd.

M. Braspartz ne demanda pas d’explication à Geneviève sur les exigences que Rousselière aurait exprimées à ce sujet, sur les conflits probables qui avaient amené la jeune femme à cette extrémité. Il prenait la question telle qu’on la lui présentait, faisant lui-même le point dans les laboratoires de sa vie secrète intense. Son chef bien rond, encore chevelu, — les cheveux demi-ras comme au temps de son service militaire dans l’infanterie coloniale, — les traits fortement sculptés dans cette pierre des têtes bretonnes construites en noblesse, il dardait sur cette belle fille qui était la sienne un regard bleu si lourd qu’il la bouleversa.

— Oui, oui, se contentait-il de dire,

Geneviève paraissait toute palpitante. Elle en était à son dernier coup de dés. Elle avait secrètement espéré que ce clerc de notaire pratique la retiendrait au bord de l’abîme où son imprudence généreuse la poussait : « Malheureuse ! ne fais pas cela ! Quoi ! renoncer à une situation si belle, si