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rêves mirifiques, endormira les brûlures de l’orgueil rongé — comme chez maman. Petite fille, autrefois, j’avais toujours, paraît-il, une chanson aux lèvres. Je retrouverai les chansons bretonnes, pour chanter en travaillant comme les bonnes et les peintres en bâtiment. Les journées s’étireront ainsi jusqu’aux deux retours quotidiens de Denis. À cette pensée de Denis qui serait placé bientôt devant la réalisation de son idée fixe, Geneviève eut au cœur une petite secousse.

À vrai dire, son vainqueur, dans la défaite présente, dans son abdication qui lui paraissait si peu glorieuse, ç’avait été le petit Pierre et non pas celui qui avait combattu près de quatre années sans l’obtenir. C’était de ne plus pouvoir admettre le chagrin de son petit garçon qu’elle se rendait. Mais quelle serait la réaction de son mari devant l’accomplissement de son passionné désir ?

Est-ce qu’il était temps encore ? Est-ce que Denise Charleman ne lui avait pas jeté des chaînes déjà incrustées dans son être quoique bien subtiles ? Est-ce qu’il comprendrait la tragédie silencieuse du cœur de sa femme, et que ce métier à quoi elle renonçait lui collait pourtant à l’existence comme la peau aux os ?

Est-ce qu’elle connaîtrait encore de lui l’abandon absolu d’autrefois, et ces expressions continuelles et charmantes d’une passion dont elle était loin de se sentir lasse ? Est-ce qu’il ne trouverait pas son sacrifice tout naturel ? Enfin, est-ce qu’il n’était pas trop tard ?

Elle eut un petit frisson de doute, de désespoir. Tout perdre, — et ne rien gagner peut-être ! Et pas une lumière autour d’elle, hormis celle de Dieu qu’elle avait implorée mais qui ne se faisait pas encore sentir objectivement.

Elle ouvrit le dossier « Terrains », déploya une