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— Comme je suis devenue jalouse ! pensa-t-elle seulement.

Et délivrée de son inquiétude, elle se rendit à son ancienne armoire de jeune fille où les garçons avaient mis du désordre et où elle eut quelque peine à retrouver ses bouquins de Droit. Sur la route du retour, des sentiments assez incohérents agitaient son cœur. Le premier l’emportait avec une secrète frénésie vers le cabinet où elle siégerait demain, où elle reprendrait sa vraie personnalité si effacée, si estompée dans les petits tracas de la maison depuis trois mois ! Mais un autre mouvement plus secret, aux plus creux d’elle-même, la rejetait avec une légère angoisse vers les puissances mystérieuses de ce foyer dont elle allait se délier par force : son tout petit bébé si attendrissant de faiblesse, son petit Pierre qu’elle ne déshabillerait plus le soir, qu’elle ne balancerait plus dans ses bras maternels… Denis !… Ah ! Denis !…

Elle voulut marquer d’un petit signe affectueux ce dernier repas de son congé. « Je suis sûre, se dit-elle, que Denis ya me rapporter des fleurs. Moi, je vais choisir quelques gâteaux ! » Et craignant d’arriver la dernière, c’est en toute hâte qu’en sortant du métro elle fit un détour vers la pâtisserie.

— Monsieur est-il rentré ? fut la première chose qu’elle demanda à Mme Poulut.

— Non, Madame, Monsieur a fait comme Madame ; il s’est mis un peu en retard.

Mais une petite voix triomphale s’écria dans la chambre des enfants :

— Maman ! C’est maman !

— Oui, mon trésor ! c’est maman qui arrive pour te déshabiller.

Le gros poupard était assis raisonnablement à