Page:Yver - Madame Sous-Chef.djvu/225

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Est-ce que Geneviève n’entend pas tout cela ? se demandait-il. Est-ce qu’elle n’est pas assez subtile pour prendre à tous ces indices le degré de la fièvre inquiète qui mine ce pauvre gosse : cette crainte latente de sa gouvernante, cet accablement d’une si sèche autorité, cette privation de l’enveloppement maternel irremplaçable ? Comme il s’accroche à sa mère ! Quelle puissance d’appel dans ces deux petits bras qui se tendent ? Se peut-il qu’elle résiste encore ?

Mais voilà : ces instants si alourdis par le drame de sa vie conjugale, si pathétiques de poser une fois de plus le problème de la double existence pour Geneviève, se passaient dans ce décor léger d’opéra-comique, dans ce mélange de la nature et de l’auberge qui leur ôtait leur gravité. La jeune femme mettait ses soins à paraître leur dénier toute importance. Sa physionomie un peu plus fermée que de coutume refusait tout aveu. Dès que le soleil déclinait, elle reprenait Pierre dans ses bras et il s’y blottissait comme un être qui a peur. Puis on refaisait la route qui menait à l’hôtel.

Malheureusement, la seconde semaine fut pluvieuse. Les parents demeuraient une partie de leur journée dans la chambre. Mlle Hedwige promena de nouveau dans leur carrosse à double place les deux enfants bien abrités de la pluie. Ce ne fut pas sans les pleurs amers du petit Pierre qui se souvenait des radieuses promenades au cou de sa maman. La première fois qu’on le ceintura dans la caisse de la voiture il poussa d’affreux cris. Mademoiselle triompha :

— Madame se rend compte du résultat obtenu par ses promenades en compagnie des grandes personnes !

— Évidemment, pensa Geneviève, Mlle Hedwige